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Hommage à Peter Zanni Alias Peter Prada

Dernière mise à jour : 14 oct.


Peter Prada n'est plus.

Ce fut un ami de soirées, un confident parfois, un soutien souvent. C'était un homme complexe, flamboyant et perspicace. Généreux, il pouvait parfois être cassant, voire même blessant. Mais il était avant tout un homme passionné, volontaire, qui croquait la vie à pleines dents, n'hésitant jamais à renaître plusieurs fois pour arriver à ses fins. Nombreux sont ceux qui le considéraient comme un personnage superficiel. Ce n'était point le cas. Il portait de nombreux masques pour se protéger de la jalousie ambiante, de l'aigreur et des courtisans.


Je le connaissais depuis plus de dix ans. Nous nous croisions lors des vernissages et autres événements parisiens. Quand Victoria et moi avons ouvert la Vanities Gallery, il a toujours été l'un des plus fervents soutiens de notre entreprise. Il savait ce que c'était que les difficultés de la vie, et nous nous entendions bien sur ce sujet. Nous n'en avions jamais parlé directement, mais son enthousiasme communicatif était symptomatique, comme chez moi, d'une vie d'épreuves.


On le surnommait Peter le fou, tout comme on me surnomme Mr Dolloway. Quand il nous a présenté l'artiste David Feruch, c'était l'occasion de travailler ensemble, et nous avons commencé à réfléchir au concept de l'exposition qui se tiendra en décembre. C'est ainsi, de fil en aiguille, qu'il m'a demandé d'écrire et de consigner sa biographie. J'ai aussitôt accepté, car je savais qu'il voulait transmettre un message, laisser une trace. J'ai commencé à prendre des notes lors de mes visites à l'hôpital Saint-Joseph. Il était déjà fort amaigri, et nous étions pressés car le corps médical lui avait donné une espérance de vie de seulement un semestre. Je ressentais son envie d'aller plus vite, de faire transparaître un message. Mais le temps nous a été refusé pour achever ce travail.


Cet échange n'est pas assez long pour que je puisse le publier sous la forme d'un ouvrage. Mais je sais que Peter aurait aimé que je le partage. C'est pourquoi je vous laisse découvrir ses dernières pensées sur sa vie, le monde, et l'importance d'être.



Thierry Tessier


Portrait de Peter Prada
Portrait de Peter Prada

Quel est le but de ces entretiens cher Peter?

Les médecins m'ont donné six mois à vivre. Je subis un traitement très lourd, et je veux laisser un message à mes amis ainsi qu'aux inconnus qui pourraient voir dans ma vie une source d'espoir, une raison de s'accrocher et de trouver la volonté de continuer à avancer. J'ai beaucoup profité de la vie, et je ne le regrette pas. Je rêverais de travailler encore, car j'ai tellement d'idées que je voudrais voir aboutir. En aurai-je le temps ?

Ces entretiens sont en quelque sorte un message d'outre-tombe pour toute personne qui vit dans le doute et la difficulté. Si cela peut aider ne serait-ce qu'une seule personne, alors j'aurai atteint mon but.

Je serai sans filtre. Parfois, je changerai les noms, mais je veux être le plus juste possible. Aujourd'hui, je fais tomber tous mes masques.


Sur Paris tu es connu sous le nom de Peter Prada d’où te vient ce surnom ?

Mon nom à l'état civil est Peter Zanni, ce qui fait écho au personnage qui sème la zizanie dans la commedia dell'arte. Comme lui, je porte un masque pour être et paraître. Je suis un trublion des mondanités, et en même temps un homme très terre-à-terre qui cache ses fêlures. "Peter Prada" me vient du fait que j'affectionnais particulièrement cette marque quand j'étais jeune homme, et que je ne jurais que par elle. Ce surnom m'a été donné par mes amis, et je l'ai fait mien.


J'ai toujours été un enfant gentil et expansif. Lors de l'agonie de ma mère, quand elle me voyait toujours habillé en Prada et que je commençais ma vie mondaine, elle m'a dit : « Les gens vont te bouffer, mon chéri, protège-toi. Fais de ce surnom ton arme. » Elle m'a soufflé l'idée d'utiliser ce surnom afin qu'on me laisse tranquille. C'était une sorte de carapace, une armure face à cette société superficielle où le ridicule tue encore.


Je précise tout de suite que la famille Prada ne m'a jamais inquiété à ce propos, et je les respecte beaucoup. Ils n'ont jamais été gênés par ce choix de vie, car je n'ai jamais monétisé ce nom ni profité de cet avantage.

 

Peux-tu nous conter en quelques lignes ton enfance ?

Je suis né en 1981 dans le quartier de Via Cassia[1], qui est un quartier plutôt chic. Mon père tenait une blanchisserie industrielle : Lavanderia Micheli. Et ma mère était une femme admirable. Mon premier choc, je l'ai vécu vers l'âge de 8 ou 9 ans, lorsque l'on me tendit le combiné du téléphone en me disant que c'était mon vrai père qui appelait. C'est ainsi que j'ai appris que j'avais été adopté. Mes géniteurs étaient assez âgés. Malheureusement, mon père biologique, chevalier de la croix du Panthéon, est décédé quelques mois après cet échange téléphonique. Je puis dire que je ne les ai pas connus. Mes parents adoptifs ont été ma seule véritable famille, aimante et généreuse.

 

Je suppose que ce fut un choc pour le jeune garçon que tu étais que d’apprendre que tu avais été adopté ?

Tout à fait, je me souviens très bien que je n'ai exprimé ni ma douleur ni mon incompréhension. Après l'explication de mes parents adoptifs, lorsqu'on me demanda si j'allais bien, j'ai répondu sans réfléchir par l'affirmative, me renfermant sur moi-même. Je me créais ainsi mon premier masque. L'une de mes devises, d'ailleurs, sera : never explain, never complain. Avec le recul, je pense que ce choc familial a été très important et a développé en moi ce caractère emphatique, afin que personne ne se doute de l'état de ma psyché.

 

Puis-je me permettre cette question, pourquoi tes parents adoptifs t’ont-ils adoptés ?

Ma mère adoptive ne pouvait pas avoir d'enfants. Elle avait eu de nombreux frères et sœurs et voulait former une famille. Ils m'adoptèrent pour réaliser ce rêve, et je leur en suis reconnaissant. Il y avait beaucoup d'enfants à la maison, car mes parents ouvraient toujours leur porte aux enfants du quartier pour former une grande tablée. C'était formidable, j'avais beaucoup d'amis. Ensuite, ils sont également devenus une famille d'accueil et ont accueilli une jeune fille, qui vit toujours dans la famille aujourd'hui.


Peux-tu nous raconter les images qui te reviennent de ton enfance, quelle en était l’atmosphère ambiante ?

Si je devais résumer mon enfance en quelques mots, ce serait : amour, soleil, amitiés, tranquillité, joie et simplicité.En effet, j'ai passé mon enfance entre Rome, Grenoble et Favignana, où mes parents possèdent une petite villa au bord de la mer. Nous occupions cette maison chaque été.

À Rome, la famille habitait tout un immeuble. Le rez-de-chaussée était occupé par la blanchisserie, et les étages supérieurs étaient réservés à mes tantes, ma grand-mère et nous. J'ai eu la chance d'être entouré de tant d'adultes, ce qui m'a permis de vivre une enfance agréable, voire choyée. En même temps, mon esprit était constamment stimulé, ce qui m'a permis de développer très tôt une grande capacité de réflexion.

 

Comment pourrais-tu classer socialement ta famille ?

Je dirais que ma famille est bourgeoise, possédant un immeuble à Rome, une maison secondaire à Favignana et même un petit bateau. Je me souviens que c'était un Nostromo que mon père avait baptisé Peter. Lors de l'achat, au salon nautique, j'avais été malade. Pensant que je faisais des simagrées, mon père me gronda. Mais le mal ne s'atténuant pas au cours de la soirée, il fallut bien admettre que j'étais réellement malade. Le médecin, appelé à mon chevet, expliqua que j'avais une méningite. Je fus correctement soigné et n'en ai gardé aucune séquelle. Par excuse, ou peut-être pour marquer mon rétablissement, je ne saurais dire, mon père baptisa le bateau Peter. Ce fut, tu t'en doutes, un grand moment de fierté.

 

Tu nous as expliqué que tu passais tes vacances à Favignana, comment y était la vie sur cette île à cette époque ?

La vie à Favignana était simple.L'île de Favignana fait 17 km de long, et la vie se résumait à faire du vélo, acheter du poisson au marché, bronzer et jouer sur la plage. D'ailleurs, je me souviens que j'avais la passion de chasser les poulpes, quelle fantasque lubie ! Nous adorions aussi faire des glaces, cueillir des figues et d'autres fruits. C'était réellement un petit paradis sur terre. C'est une petite île, et quand on est enfant en bas âge, c'est une parenthèse de rêve. En revanche, à l'adolescence, c'était plus compliqué car c'était bien trop calme pour moi.


Mon père aimait tellement cet endroit qu'il rêvait d'y vivre à l'année. Il lui faudra plusieurs années avant de franchir le pas. C'est en vendant les parts de la société familiale, avec un pécule bien placé, qu'il put devenir rentier et installer la famille à demeure à Favignana. J'étais alors adolescent. Je me retrouvais dans un lieu très rural, alors qu'à Rome, je menais déjà une vie très agréable et culturelle. Il faut comprendre que les villageois de cette île parlaient le dialecte local, et ils nous appelaient d'ailleurs "les Français". Pour les Siciliens, nous étions les différents ! Favignana commençait tout juste à devenir le Saint-Tropez italien.

 

Nous avons beaucoup de clichés que l’Italie, et l’un d’eux et l’importance de la religion, as-tu été élevé dans la religion catholique ?

Ma famille élargie est évangéliste et pieuse. Ils allaient tous les dimanches à l'office. Quant à ma famille nucléaire, bien que croyante, elle était beaucoup plus souple. Seule ma mère faisait preuve de plus de piété. J'ai été élevé dans une large liberté religieuse, et je les en remercie. Aujourd'hui, je n'y crois plus du tout, compte tenu de tout ce que j'ai vécu. J'ai essayé de tout comprendre en explorant le bouddhisme, le taoïsme et d'autres religions et philosophies, mais mon constat a toujours été le même : toutes les religions ont été créées par des humains, donc il y a un biais dès le départ.

 

Comment c’est passé ta scolarité ?

Jusque mes 17 ans, je suis scolarisé à Rome. Le collège public que j’ai fréquenté était la Scuola Media Bruno Buozzi. Pour le lycée, nous avions déménagé officiellement à Favignana, et j’ai donc poursuivi mes études à Palerme, au lycée privé Link Campus. J’y suis resté deux ans.


Pour être honnête, je n’ai jamais réussi clairement à m’adapter. J’y ai connu mes premiers amours et j’ai immédiatement assumé mon côté gender fluid. Homme ou femme, peu m'importe, tant que la personne est belle. Bien que ce fût une grande ville, je trouvais l’esprit très fermé, chaque quartier étant très différent et marqué. J’ai tout fait pour partir.


Il y avait pourtant quelques bons côtés. Je me souviens par exemple que, durant ces deux ans, j’ai suivi, avec une bande d’amis, un groupe de musique formé de cinq jeunes hommes, folklo-hip hop, nommé Tintura. Nous essayions de les voir le plus souvent possible. Grâce à eux, j’ai presque visité toute la Sicile, comme Agrigento, Syracuse et d’autres endroits.

 

Quel était ton rêve professionnel quand tu étais jeune ?

Je me voyais faire du droit pénal, mais je n’avais pas d’esprit de synthèse. Mon esprit pense très vite ; je suis fait pour l’action. Souvent, les gens autour de moi me croient confus, mais non, c’est juste que je pense très vite, donc je vois trois à quatre coups à l’avance. J’ai vite compris que passer des heures en bibliothèque à rédiger des plaidoiries, à les corriger et à recommencer jusqu’à la perfection n’était pas pour moi. J’ai besoin que ce soit tourbillonnant, palpitant, rapide et vif. Finalement, la vie d’avocat est trop étroite pour moi ; j’avais besoin d’espace, même si cela signifiait souvent de sauter dans l’inconnu.


J’ai donc fait une année sabbatique. J’ai essayé de développer un réseau pour faire du cinéma, car je me disais que mon caractère expansif pourrait plaire. J’ai cherché à faire de la figuration. C’est pourquoi je suis retourné à Rome. J’ai essayé de me faire inviter aux soirées VIP de Rome, mais cela se passait mal. J’ai donc repris le chemin et je suis arrivé à Venise, où je suis resté trois mois. La ville étant belle mais trop calme à mon goût, j’ai fui vers Milan, la capitale économique, où j’ai vécu une année.


Je me souviens qu’un jour, j’avais un casting pour une émission de télé et en même temps je cherchais à me loger à Milan. Dans la file d’attente du casting, j’ai sympathisé avec une jeune femme qui m’a présenté sa mère, qui n’était autre que Barbara Marugo. C’était alors l’un des super modèles. Nous avons tout de suite sympathisé, et Barbara a accepté de me loger quelques temps. Depuis, nous sommes devenus amis. Malgré cette aide précieuse, j’ai compris que Milan n’était pas fait pour moi.


Je suis donc retourné à Rome, où, à l’âge de 18 ans, j’ai hérité de ma vraie mère ; l’héritage avait en effet été bloqué jusqu’à mes 18 ans. Au même moment, j’ai appris que ma mère adoptive était atteinte d’un cancer, son état étant très grave.


J’étais alors inscrit à l’Académie d’Art Dramatique, mais j’étais absent ; je n’étais pas bon car mon esprit était entièrement tourné vers ma mère.


Pendant son traitement, je suis monté à Paris. Je pensais que Paris serait ma sortie de secours. Disons-le simplement, j’étais totalement paumé.


Six mois après, ma mère adoptive disparaissait à cause d’un cancer.


Le jour de l’enterrement, je pleurais ma mère, et lorsque j'entendis dans l’église sa voix : "Souris à la vie, la vie te sourira." Cela peut paraître surprenant, mais entendre son conseil si juste et beau m’a bouleversé d’une manière inouïe. En effet, je quittais l’église avec le sourire et l’envie de vivre. J’ai fait de cette phrase mon second adage. Mais c’était également le second masque qui se collait à mon être : celui d’un personnage public toujours positif face à l’adversité, tout en étant réaliste dans l’intimité. Ce paradoxe était parfois inconciliable.


Je me souviens que j’avais adopté mon chien Zampa peu de temps après ; c’était un border collie que j’avais trouvé à la SPA. Je n’ose pas le dire, mais il était très intelligent, bienveillant, et souvent, je me suis dit qu’il y avait une part de ma mère en lui. Il était trop adorable ; c’était un chien magique, un animal très protecteur.

 

Il semble que tu étais un jeune homme quelque peu perdu, par suite du décès de ta mère, ta situation a dû être encore plus critique ?

Je quitte Rome pour aller à Luxembourg, où je m’oxygène et rencontre un dénommé Bastien, qui m’a soutenu.Ce jeune homme était également perdu ; en fait, nous nous sommes soutenus l’un et l’autre, du moins au début.


Bastien m’emmène à Longwy, et nous avons alors une vie plutôt agréable. Je travaillais comme vendeur dans un magasin multi-marques et je deviens rapidement le meilleur vendeur de Luxembourg. Quant à Bastien, il travaillait au Kinepolis. Il rêvait de voyages et de la grande vie, alors que moi, j’étais plus en recherche de moi-même dans le calme et la simplicité. Avec le recul, je considère que Bastien a plus profité de ma vie que moi de lui. Nous avons beaucoup voyagé en Italie et ailleurs, toujours à mes frais. Je ne me suis nullement rendu compte que Bastien vivait à mes crochets, et en quelques années, mon héritage avait fondu comme neige au soleil.


Pendant six années, nous avons été plus ou moins ensemble. Mais les tensions étaient nombreuses, et j’ai finalement décidé de louer un petit appartement à Longwy. Je n’avais qu’une seule valise et mon chien. Je me sentais libre, mais j’avais trop vite oublié la méchanceté de Bastien, qui a voulu se venger du fait que je m’étais éloigné. Il a tout fait pour que je perde mon travail ; à force de rumeurs et de dénigrements, il a réussi. Je n’avais donc plus les moyens de payer un loyer. Je n’avais d’autre choix que de quitter mon appartement. Je me suis dit qu’il fallait que je change de vie à 180 degrés et que je reprenne les rênes de ma vie en main. Il me fallait partir, quitter cet univers anxiogène. Ma décision était prise : je devais monter à Paris.


N’ayant pas d’argent avec moi, j’ai osé prendre la route en faisant de l’autostop.


Je me souviens d’une anecdote. J’étais en transit à Metz, sur une aire d’autoroute. Je me refaisais une beauté dans les commodités communes. C’était grand et lumineux, et j’avais pris mes aises en posant mon petit nécessaire de luxe auprès de l’évier. J'ai croisé une femme élégante. Elle me sourit, elle est charmante ; nous commençons à discuter de tout et de rien. Tout en discutant, nous sympathisons réellement et marchons vers le hall du bâtiment. Je vois stationner devant l’immeuble une belle Jaguar verte, et je comprends que c’est le bolide de mon interlocutrice. Elle m’explique qu’elle va à Strasbourg et me demande si je veux l’accompagner. J’hésite une demi-seconde, mais mon subconscient parle en moi et répond par la négative. Elle insiste et je confirme que non, je dois me rendre à Paris ; ma vie m’attend là-bas. Souvent, je repense à elle. Pourquoi cette si belle et élégante femme était-elle venue me parler ? Avait-elle flirté avec moi ? Avait-elle vu en moi la détresse ? Avait-elle juste besoin d’un ami ? Je ne sais pas. Qu’aurait été ma vie si j’avais accepté de la suivre à Strasbourg ? Aurais-je été heureux ? Je pense que cet événement anodin m’a marqué, car c’est l’une des premières fois où je n’ai pas suivi quelqu’un, ni un conseil, mais que j’ai pris en pleine conscience que cette décision d’aller à Paris était la mienne et qu’elle changerait ma vie.


Comment se passe ton arrivée à Paris ?

On est en 2008. De Paris, je ne me souvenais que des voyages que j’avais faits plus jeune, et j’appréciais cette ville. Mais je ne savais pas où dormir, car je n'avais pas de contacts et pas d'argent. La seule personne que je connaissais un peu était un certain Thierry, l’amant de Toni Gomez, qui avait ouvert l’Amnésia Café dans le Marais, puis le Féria Café. J'ai cherché à le rencontrer pour obtenir un travail. Ce ne fut pas réellement facile, et j'étais fort seul et isolé, même si je ne le montrais pas. Peu de personnes le savent, mais à cette époque, je dormais sur les quais de Seine, en face de la Tour d’Argent, sur un banc en pierre. C'était dangereux ; je devais faire attention de ne pas me faire voler ni embrouiller. J'ai dormi comme sans domicile fixe durant quelques semaines. Entre-temps, j'ai enfin pu rencontrer Thierry, et grâce à ma tchatche, j’ai commencé à travailler au Féria Café comme serveur pendant une semaine. Mais ce fut une très courte expérience, car j'étais une catastrophe. J'avoue qu'avec ma dyslexie, mon esprit parfois trop rapide, et ma maladresse légendaire, j'étais un serveur de piètre qualité. Cependant, j'étais très sympathique et les clients m'appréciaient beaucoup.


C’est là que j’ai rencontré Jérôme et son frère, qui avaient commandé, je m'en souviens parfaitement, un hamburger-frites. Malheureusement, je lui ai renversé le plateau sur lui tout en disant avec aplomb et sans arrière-pensée : "Ouf, je ne me suis pas taché !" (Pour moi, c'était vital, car je n'avais pas les moyens d'une laverie automatique). Bien évidemment, mon propos était déconnecté de la réalité, puisque le client, en l'occurrence Jérôme, avait été tâché par la nourriture. Au lieu de s'énerver, Jérôme a ri de mon audace, et nous avons commencé à converser. Juste après avoir payé son addition, Thierry lui expliqua ma situation. Jérôme, par sympathie, me proposa de loger chez eux. J'ai évidemment accepté, car la belle étoile à Paris est bien trop fraîche. Je n'avais pas réalisé qu'ils vivaient à Coulommiers. C'est ainsi que je m'embarquais avec deux inconnus dans une petite ville française que je ne connaissais absolument pas. La maison était grande. Je pris la chambre du fond et dormis 72 heures d'affilée, tellement j’étais fatigué, épuisé. Jérôme était inquiet ; il me croyait malade, car se reposer autant de temps était plus qu'extraordinaire. Mais il n'osait me réveiller, car nous ne nous connaissions pas. Par la suite, je lui détaillai ma situation, ce qui expliquait mon extrême fatigue. Tout en papotant, il m'exprima son vœu de quitter Coulommiers pour vivre à Paris. Il gérait comme vendeur une boutique de vêtements pour femmes. C'était tranquille, mais pas folichon. Je me suis dit : essayons de faire quelque chose ensemble, de partir à la conquête de Paris ! Mais pour le moment, je devais me rendre à Paris tous les jours pour travailler au Féria. Je n'avais pas anticipé que le trajet, que ce soit par train ou par bus, serait aussi épuisant et contraignant.


Thierry, considérant à juste titre que je ne pouvais pas continuer à être serveur, me proposa d’être rabatteur pour le restaurant. Avec ma tchatche, je faisais entrer des clients, qu'ils soient gays, lesbiennes, ou autres. Connaissant de mieux en mieux le quartier du Marais, je suis devenu ami avec le propriétaire du Raidd Bar, un nouveau bar tendance du Marais qui fut le premier à présenter un go-go danseur sous une douche chaque soir. Je terminais mes soirées de travail à 2h du matin et je devais prendre le bus pour rentrer à Coulommiers. C’était épuisant.


C'est pourquoi Jérôme et moi avons décidé de prendre un appartement sur l’île Saint-Louis. L’ironie du sort, c’était que cet appartement était situé à seulement 20 m d’où je dormais sur les quais de Seine.


C'était au 75, rue Saint-Louis en l’île, au 1er étage, un petit appartement de 50 m². C’est grâce à mes relations dans le monde de la nuit que nous avons obtenu cet appartement, pour un loyer très modéré et bien en deçà du prix du marché. Je continuais à être rabatteur. Quant à Jérôme, il trouva du travail comme vendeur le jour et comme serveur le soir à l’Auberge des Deux Ponts.


Dans le Marais, j’étais surnommé Peter le Fou. J’avais eu des relations avec différents partenaires (homme, femme ou trans) et j’entrais partout, que ce soit dans les clubs lesbiennes, gays ou transgenres.


Au Raidd Bar, je suis devenu connu sous le nom de "Jeune homme de bonne famille", où j’ai rencontré Elios, qui m’a introduit à Saint-Germain-des-Prés, en particulier au bar le Saint-Germain, géré par la famille Coste, dont le responsable était Christophe. J'y ai rencontré une femme nommée Andy, mannequin et ancienne miss, qui habitait au 54, rue des Saints-Pères. Elle était la meilleure amie de Kate Moss, Jean-Paul Gaultier et John Galliano. Elle avait un appartement de 200 m² ; elle s'y sentait seule, et souvent nous faisions la fête jusqu'à pas d’heure. Et c’est ainsi que je rencontre Abel, acteur du Prophète, Galliano, Christophe des Mots Bleus, Philippe Starck, puis nous allions au Montana, et surtout à l’Échelle Jacob (n°12).


Peux-tu nous préciser ton impression sur Galliano?

Quand j’ai rencontré Galliano, il venait de perdre son chien. Il était sobre et venait d’acheter un tableau chez Pedro. Il était gentil, délirant, un peu exubérant. Dans son métier, il est effectivement extravagant. L’homme que j’ai rencontré était totalement différent de celui du scandale de 2011. Pour moi, c’est le groupe LVMH qui l’a poussé à l’extrême et au burn-out. Galliano a simplement pété un câble ; ce n’était pas malin. C'était clairement stupide, mais avait-il conscience de ce qui se passait ? A-t-il été manipulé par LVMH ? Je ne sais pas. Mais cette histoire n'est pas claire et ne le sera jamais.


Revenons à ta découverte du quartier Saint Germain?

Au café Saint Germain, on buvait baucoup d'alcool, tout le monde se droguait, on chahutait, nous jouions au billard à l'étage. C'était une ambiance délirante, très décadente, dans un esprit de fin de siècle.


[Suite à la disparition de Peter nous n'avons pu terminer les entretiens]

 

 


Peter Zanni Alais Petre Prada à son dernier anniversaire, il y a 10 jours en octobre 2024
Peter Zanni Alias Peter Prada à son dernier anniversaire, le 28 septembre 2024


[1] La zone de la Via Cassia est située au nord-ouest de Rome et tire son nom de la route consulaire qui la traverse, construite pour relier Rome à Florence. La Cassia longe un itinéraire entre l’Aurelia et la Flaminia, avec laquelle, dans le passé, elle partageait le premier tronçon. Aujourd’hui, ce quartier est l’un des plus peuplés et des plus grands de la capitale, caractérisé par la présence de beaux bâtiments, de grands espaces verts et de larges rues. L’urbanisation moderne se marie harmonieusement avec l’histoire ancienne, faisant de la Cassia une région fascinante et pleine de contrastes.



 


Peter Prada is no more. He was a companion at evenings, a confidant at times, a support quite often. He was a complex man, flamboyant and insightful. Generous, though sometimes harsh, even hurtful. Yet, above all, he was a passionate and determined individual who lived life to the fullest, never hesitating to be reborn time and again to achieve his goals. Many considered him a superficial character, but that was far from the truth. He wore many masks to shield himself from the prevailing jealousy, bitterness, and sycophants.

I had known him for more than ten years. We often crossed paths at gallery openings and other Parisian events. When Victoria and I opened the Vanities Gallery, he was one of the staunchest supporters of our venture. He understood the hardships of life, and in that, we found common ground. Though we never discussed it directly, his infectious enthusiasm, much like mine, was symptomatic of a life marked by trials. He was nicknamed "Peter the Mad," just as I was called "Mr. Dolloway."

When he introduced us to the artist David Feruch, it was an opportunity to work together, and we began conceptualizing the exhibition set to take place next month. Gradually, he asked me to write, to document his biography. I immediately agreed, knowing that he wanted to convey a message, to leave behind a legacy. I started taking notes during my visits to him at St. Joseph's Hospital. He was already greatly emaciated, and we felt the urgency as the medical team had given him a prognosis of only six months to live. I sensed his desire to move quickly, to share his message with the world. But time was not on our side, and we could not complete this project.

This exchange is not long enough to be published as a book, but I know Peter would have wanted me to share it. Thus, I offer you his final reflections on his life, the world, and the importance of simply being.

Thierry Tessier



What is the purpose of these interviews, dear Peter?

The doctors have given me six months to live, and I am undergoing very heavy treatment. I want to leave a message for my friends and for strangers who might see in my life a possibility of hope, of holding on, and finding the will to keep moving forward. I have enjoyed life immensely, and I do not regret it. I still dream of working because I have so many ideas I want to bring to fruition. Will I have the time?

These interviews are, in a way, a message from beyond the grave for anyone living with doubt and hardship. If they can help, even just one person, then I will have achieved my goal.

I will be unfiltered, though sometimes I will change names, but I want to be as truthful as possible. Today, I am shedding all my masks.


In Paris, you are known as Peter Prada. Where did this nickname come from?

My legal name is Peter Zanni, which echoes the character who causes mischief in the Commedia dell'arte. Like him, I wear a mask to be and appear. I am a troublemaker in social circles, and at the same time, a very down-to-earth man who hides his cracks. The name Peter Prada came from my fondness for that brand when I was a young man. I swore by it. My friends gave me this nickname, and I made it my own.

I was always a kind and outgoing child. During my mother’s final days, as she saw me constantly dressed in Prada and starting my social life, she told me, "People will eat you alive, my darling. Protect yourself; make this nickname your weapon." She whispered to me the idea of using the name Prada so people would leave me alone. It became a kind of shell, an armor against a superficial society where ridicule still kills.

Let me clarify that the Prada family has never bothered me about this, and I respect them greatly. They were never offended by my choice because I never monetized the name or took advantage of it.


Can you share a few lines about your childhood?

I was born in 1981 in the Via Cassia neighborhood, a rather upscale area. My father ran an industrial laundry, Lavanderia Micheli, and my mother was an admirable woman. My first shock came when I was about eight or nine years old when someone handed me the phone and told me my real father was calling. That's how I learned I had been adopted. My biological parents were quite elderly, but unfortunately, my father, a Knight of the Cross of the Pantheon, passed away a few months after that phone call. I can say I never really knew them. My adoptive parents were my true, loving, and generous family.


I suppose it was a shock for the young boy you were to learn you had been adopted?

Absolutely. I vividly remember not expressing my pain or confusion. After my adoptive parents explained it to me, when asked if I was okay, I reflexively said yes, withdrawing into myself. That’s when I created my first mask. One of my mottos later in life became "never explain, never complain." In hindsight, I believe that familial shock was very important and led me to develop an exaggerated character so that no one would suspect the state of my mind.


May I ask why your adoptive parents chose to adopt you?

My adoptive mother could not have children. She had many siblings and wanted to build a family. They adopted me to fulfill that dream, and I’m grateful for it. There were always lots of children in the house because my parents opened their doors to the neighborhood kids, creating a large, lively gathering. It was wonderful—I had many friends. My parents also became foster carers, and they took in a young girl who is still part of the family today.


Can you share some memories of your childhood, and describe the atmosphere?

If I had to summarize my childhood in a few words, it would be: love, sunshine, friendship, peace, joy, and simplicity.

I spent my childhood between Rome, Grenoble, and Favignana, where my parents have a small seaside villa. We spent every summer there. In Rome, the family owned an entire building. The ground floor housed the laundry, while the upper floors were occupied by my aunts, my grandmother, and us. I was lucky to be surrounded by so many adults. I had a pleasant childhood—some might even say a pampered one. At the same time, my mind was constantly stimulated, and I quickly developed a fast-thinking ability.


How would you classify your family socially?

I would say my family was bourgeois, owning a building in Rome, a secondary home in Favignana, and even a small boat. I remember it was a "nostromo" my father named Peter. At the boat show where we bought it, I had gotten seasick. Thinking I was faking it, my father scolded me, but as the illness persisted into the evening, it became clear I was truly sick. A doctor was called and diagnosed meningitis. I was treated properly and suffered no lasting effects, but perhaps out of apology or to mark my recovery—I'm not sure—my father named the boat Peter. You can imagine, it was a moment of great pride for me.


You mentioned spending your vacations in Favignana. What was life like on the island at that time?

Life in Favignana was simple. The island is just 17 kilometers long. It was all about riding bikes, buying fish at the market, sunbathing, and playing on the beach. I remember being obsessed with hunting octopus—what a whimsical hobby! We also loved making ice cream, picking figs, and gathering other fruits. It truly was a small paradise on earth. It’s a small island, and as a young child, it was a dreamlike place. But in adolescence, it became more complicated because it was far too quiet for me.

My father loved that place so much that he dreamed of living there year-round. It took him several years to take the plunge, but by selling the family business shares and wisely investing the funds, he was able to retire and move the family to Favignana. By then, I was a teenager. I found myself in a very rural place, whereas in Rome, I had lived a culturally rich and pleasant life. You must understand that the islanders spoke the local dialect, and they called us "the French." To the Sicilians, we were the outsiders! Favignana was just starting to become the "Saint Tropez of Italy."


There are many clichés about Italy, one of which is the importance of religion. Were you raised in the Catholic faith?

My extended family was evangelical and devout. They attended services every Sunday. As for my immediate family, though they were believers, they were much more flexible. Only my mother was more pious. I was raised with a broad religious freedom, and I am grateful for that. Today, I no longer believe, given everything I’ve experienced. I tried to understand by exploring Buddhism, Taoism, and other religions and philosophies, but my conclusion was always the same: all religions were created by humans, so there is a bias from the start.


How did your schooling go?

Until I was 17, I was schooled in Rome. The public middle school I attended was Scuola Media Bruno Buozzi. For high school, we officially moved to Favignana, and I continued my studies in Palermo at the private Link Campus High School. I stayed there for two years.

To be honest, I never truly managed to adapt. It was during this time that I experienced my first loves. I immediately embraced my gender-fluid side. Man or woman, it doesn’t matter to me, as long as the person is beautiful. Even though Palermo is a large city, I found the mindset very closed, with each neighborhood distinct and strongly characterized. I did everything I could to leave.

However, there were also some positive aspects. I remember that during those two years, I followed a band with a group of friends—a music group of five young men playing a blend of folk and hip hop, named Tintura. We tried to see them as often as possible, and thanks to them, I almost visited the whole of Sicily, including places like Agrigento, Syracuse, and others.


What was your dream job when you were young?

I envisioned myself working in criminal law, but I lacked a sense of synthesis. My mind works very quickly; I am built for action. People around me often think I'm confused, but no, it’s just that I think fast and see three or four moves ahead. I quickly realized that spending hours in the library writing briefs, editing them, and rewriting them until perfect was not for me. I need things to be fast-paced, thrilling, rapid, and lively. In the end, the life of a lawyer felt too narrow for me; I needed space, even if it often meant jumping into the unknown.

So, I took a gap year. I tried to build a network to enter the film industry, thinking my expansive personality could appeal to people. I sought work as an extra, which is why I returned to Rome. I tried to get invited to VIP parties in Rome, but things didn’t go well, so I moved on and arrived in Venice, where I stayed for three months. The city was beautiful but too quiet for my liking, so I fled to Milan, the economic capital, where I lived for a year.

I remember one day when I had a casting for a television show while simultaneously searching for housing in Milan. While waiting in the casting line, I befriended a young woman who introduced me to her mother, none other than Barbara Marugo, who was one of the top models at the time. We instantly got along, and Barbara kindly offered to host me for a while. Since then, we have become friends. Despite this precious help, I realized that Milan was not for me.

I returned to Rome at the age of 18, when I inherited from my biological mother—the inheritance had been locked until my 18th birthday. At the same time, I learned that my adoptive mother had cancer, and her condition was very serious.

I was enrolled at the Academy of Dramatic Arts at the time, but I was absent and not performing well because my mind was entirely focused on my mother.

During her treatment, I moved to Paris. I thought Paris would be my escape. To put it simply, I was totally lost.

Six months later, my adoptive mother passed away due to cancer.

At her funeral, I was grieving for my mother when I heard her voice in the church: “Smile at life, and life will smile back at you.” It may seem surprising, but hearing such a beautiful and wise piece of advice moved me in an incredible way. I left the church with a smile and a desire to live. I made that phrase my second motto. But it also became a second mask for me: that of a public persona always positive in the face of adversity, while being realistic in private. This paradox was sometimes irreconcilable.

I remember adopting my dog Zampa shortly afterward, a border collie I found at a shelter. I hesitate to say it, but he was incredibly intelligent, kind, and often, I felt like a part of my mother lived within him. He was so adorable, a magical dog, a very protective animal.


It seems you were a somewhat lost young man, and after your mother’s death, your situation must have become even more critical?

I left Rome and went to Luxembourg to clear my head, where I met a man named Bastien, who supported me. He was also lost; in fact, we supported each other, at least at first.

Bastien brought me to Longwy, where we lived a rather pleasant life. I worked as a sales assistant in a multi-brand store and quickly became the top seller in Luxembourg. As for Bastien, he worked at Kinepolis. He dreamed of traveling and living a lavish life, while I was more in search of calm and simplicity, seeking myself. In hindsight, I think Bastien took more advantage of my life than I did of him. We traveled a lot in Italy and elsewhere, always at my expense, and I didn’t realize that Bastien was living off me. In a few years, my inheritance had melted away like snow in the sun.

We were together for six years, more or less, but the tensions were many. I eventually decided to rent a small apartment in Longwy. I only had one suitcase and my dog. I felt free, but I had underestimated Bastien’s malice. He wanted revenge for my distancing from him. He did everything he could to make me lose my job, and through rumors and slander, he succeeded. I could no longer afford to pay rent. I had no choice but to leave my apartment. I told myself I had to change my life 180 degrees, take control of my life again. I had to leave, to escape that toxic environment. My decision was made—I had to go to Paris.

With no money on me, I dared to take to the road, with hitchhiking as my only option.

I remember an anecdote. I was in transit in Metz, at a highway rest area, freshening up in the communal restrooms. It was spacious, bright, and I had made myself comfortable, laying out my little luxury grooming kit by the sink. I crossed paths with an elegant woman. She smiled at me, she was charming, and we began chatting about this and that. As we talked, we genuinely hit it off and walked toward the building’s main hall. I saw a beautiful green Jaguar parked outside, and I realized it was my new acquaintance’s car. She explained that she was heading to Strasbourg and asked if I wanted to join her. I hesitated for half a second, but my subconscious spoke for me, and I declined. She insisted, but I confirmed that no, I had to go to Paris; my life was waiting for me there. I often think about her—why had this beautiful, elegant woman started talking to me? Was she flirting with me? Did she see my distress? Did she just need a friend? I don’t know. What would my life have been like if I had accepted her invitation to Strasbourg? Would I have been happy? I think this seemingly insignificant event marked me because it was one of the first times I didn’t follow someone or take advice, but consciously made my own decision, understanding that going to Paris was my choice and that it would change my life.


How was your arrival in Paris?

It was 2008, and my memories of Paris were limited to the trips I had made when I was younger, but I had a fondness for the city. However, I had nowhere to sleep, no contacts, and no money. The only person I was somewhat acquainted with was Thierry, who was the lover of Toni Gomez, the man behind Amnesia Café in the Marais, followed by the Féria Café. I sought out Thierry to ask for work. It wasn’t easy, and I was quite isolated, though I didn’t show it. Few people know that during that time, I was sleeping on the banks of the Seine, across from the Tour d'Argent, on a stone bench. It was dangerous, and I had to be careful not to get robbed or hassled. I slept like a homeless person for several weeks. Eventually, I managed to meet Thierry, and thanks to my gift of gab, I got a job at the Féria Café as a waiter for a week, but it was a very short experience because I was a disaster. Honestly, with my dyslexia, quick-thinking mind, and legendary clumsiness, I made for a terrible waiter. But I was very friendly, and the customers liked me.

That’s when I met Jérôme and his brother. I remember perfectly that they ordered a burger and fries, and I accidentally spilled the tray on him, all while saying, with complete confidence and no second thought, "Phew, I didn’t stain myself!" (For me, that was essential, as I couldn’t afford to use a laundromat). Of course, my comment was entirely disconnected from reality since it was Jérôme, the customer, who had been covered in food. Instead of getting angry, Jérôme laughed at my audacity, and we started chatting. After paying his bill, Thierry explained my situation to him. Out of sympathy, Jérôme offered me a place to stay. I, of course, said yes because sleeping under the stars in Paris is far too cold. I hadn’t realized they lived in Coulommiers. And so, I found myself embarking on a journey with two strangers to a small French town I knew nothing about. The house was large. I took the room at the back and slept for 72 hours straight, I was so exhausted. Jérôme was worried, thinking I was ill, as sleeping for so long was extraordinary. But he didn’t dare wake me because we barely knew each other. Later, I explained my situation, which helped clarify my extreme fatigue. While chatting, he shared his desire to leave Coulommiers and live in Paris. He was managing a women’s clothing store, which was quiet but unexciting. I suggested, "Why don’t we try to do something together? Let’s conquer Paris!" But for the time being, I had to travel to Paris every day to work at Féria. I hadn’t anticipated how exhausting and difficult the daily commute by train or bus would be.

Thierry, quite rightly, felt I couldn’t continue as a waiter and offered me a job as a promoter for the restaurant. With my charm, I brought in customers—gay, lesbian, and everyone else. As I got to know the Marais district better, I became friends with the owner of Raidd Bar, a trendy new bar in the Marais, famous for its nightly go-go dancer shows under a shower. I would finish work at 2 a.m. and then catch the bus back to Coulommiers. It was exhausting.

That’s why Jérôme and I decided to rent an apartment on the Île Saint-Louis. The irony was that the apartment was only 20 meters from where I used to sleep on the Seine banks.

It was at 75 rue Saint-Louis en l'Île, on the first floor, a small 50-square-meter apartment. Thanks to my connections in the nightlife scene, we managed to get the place for a very moderate rent, far below the market price. I continued working as a promoter, while Jérôme found a job as a salesman during the day and as a waiter in the evening at L’Auberge des Deux Ponts.

In the Marais, I was nicknamed "Peter the Madman." I had relationships with various partners—men, women, and trans people—and I was welcomed everywhere, whether in lesbian, gay, or transgender clubs.

At Raidd Bar, I was known as the "Young Man from a Good Family," and that’s where I met Elios, who introduced me to Saint-Germain-des-Prés, particularly the bar Le Saint-Germain, run by the Coste family, with Christophe in charge. There, I met a woman named Andy, a model and former beauty queen who lived at 54 rue des Saints-Pères and was close friends with Kate Moss, Jean Paul Gaultier, and John Galliano. She had a 200-square-meter apartment and often felt lonely, so we would party together until dawn. That’s how I met Abel, the actor from A Prophet, Galliano, Christophe from Les Mots Bleus, and Philippe Starck. We frequented the Montana and especially L’Échelle Jacob at 12 Rue Jacob.


Could you describe your impression of Galliano?

When I met Galliano, he had just lost his dog, and he was sober. He had recently purchased a painting from Pedro. He was kind, eccentric, and a bit flamboyant. In his profession, he’s wild, but the man I met was entirely different from the one involved in the 2011 scandal. In my view, it was LVMH that pushed him to the edge, leading to his burnout. Galliano just snapped—it wasn’t smart. It was clearly foolish, but did he even realize what was happening? Was he manipulated by LVMH? I don’t know. But that story is murky and likely will never be clear.


Could you tell us about your discovery of the Saint-Germain district?

At the Café Saint-Germain, we drank heavily. Everyone was doing drugs, and we were always causing a ruckus. Upstairs, we would play billiards. It was a wild, decadent atmosphere, very reminiscent of a fin-de-siècle vibe.


"Following Peter's disappearance, we were unable to complete the interviews."



 

Peter Zanni Alias Peter Prada avec Victoria Zhong lors du vernissage de l'exposition de Shane Guffogg le 30 mai 2024 chez Vanities Gallery
Peter Zanni Alias Peter Prada avec Victoria Zhong lors du vernissage de l'exposition de Shane Guffogg le 30 mai 2024 chez Vanities Gallery

彼得·普拉达已经不在人世。他曾是社交晚会上的伴侣,有时是倾诉的对象,经常是支柱。他是一个复杂的人,既华丽又敏锐。慷慨大方,然而有时也很苛刻,甚至伤人。然而,最重要的是,他是一个充满激情且意志坚定的人,充实地度过了每一天,总是不畏惧一次次重生以实现自己的目标。许多人认为他是一个表面化的人物,但事实远非如此。他戴了许多面具,用以保护自己免受世间妒忌、怨恨和谄媚的侵害。

我认识他已有十多年。我们经常在画廊开幕式和其他巴黎活动中碰面。当维多利亚和我创办Vanities画廊时,他是我们事业最坚定的支持者之一。他理解生活的艰辛,我们因此产生了共鸣。尽管我们从未直接讨论过,但他那富有感染力的热情和我的一样,反映了一个曾经历经坎坷的生命。他被人称为“疯狂的彼得”,而我则被称为“多洛维先生”。

当他介绍我们认识艺术家大卫·费鲁奇时,这成为了我们合作的契机,我们开始构思下个月即将举办的展览。渐渐地,他要求我为他撰写传记。我立刻答应了,因为我知道他想传递一个信息,想留下遗产。我开始在圣约瑟医院拜访他时做笔记。那时的他已经非常消瘦,我们都感到紧迫感,医生已告知他仅剩六个月的时间。我感受到他迫切希望迅速行动,把他的信息分享给世界。但时间并不在我们这边,我们无法完成这个项目。

这次访谈虽然不足以成书,但我知道彼得希望我与大家分享。因此,我献上他对自己人生、世界以及“存在”的意义的最后思考。

蒂埃里·特西耶


这些访谈的目的是什么,亲爱的彼得?

医生们告诉我我只剩下六个月的生命,我正在接受非常重的治疗。我想为我的朋友们以及那些可能从我的人生中看到希望的陌生人留下一个信息,让他们坚持住,找到继续前行的意志。我非常享受生活,并不后悔。我仍然梦想着工作,因为我有许多想法想要实现。我还有时间吗?

这些访谈在某种程度上是一种来自坟墓的讯息,给那些怀疑或经历困难的人。如果这些访谈能帮助哪怕一个人,那么我就达成了我的目标。

我将不加过滤,尽量真实,尽管有时我会改名,但我想尽可能诚实。今天,我要卸下所有面具。


在巴黎,你被称为彼得·普拉达。这个绰号是怎么来的?

我的本名是彼得·扎尼,这与意大利即兴喜剧中的恶作剧角色相呼应。像他一样,我戴着面具生活与表现。在社交圈中,我是一个捣蛋鬼,但同时也是一个非常脚踏实地的人,隐藏着自己的裂痕。彼得·普拉达这个名字来自于我年轻时对普拉达品牌的热爱。我发誓只穿它。我的朋友们给我取了这个外号,我也把它视作自己的名字。

我一直是个友善外向的孩子。在母亲最后的日子里,当她看到我总是穿着普拉达开始我的社交生活时,她对我说:“亲爱的,人们会吞噬你。保护好自己,让这个绰号成为你的武器。”她低声对我讲述了这个使用普拉达名字的想法,这样人们就会对我有所保留。这个名字成了一种壳,一种盔甲,抵御着这个仍然充满嘲讽的社会。

我要澄清的是,普拉达家族从未因此事困扰过我,我对他们非常尊重。他们从未因我的选择感到冒犯,因为我从未以此牟利或借此攫取利益。


能和我们讲几句关于你童年的事吗?

我于1981年出生在卡西娅街区,那是一个相当高档的区域。父亲经营着一家工业洗衣店——米凯利洗衣房,而母亲则是一位令人钦佩的女人。大约在我八、九岁的时候,我第一次受到震撼。有人把电话递给我,告诉我,是真正的父亲在打电话。就这样,我知道了自己是被领养的。我的亲生父母当时已经很老了,但遗憾的是,几个月后,我的亲生父亲——一位十字军骑士——去世了。我可以说,我从未真正认识他们。我真正的、深爱我的家庭是我的养父母。


对当时的你来说,得知自己被领养一定是个不小的打击吧?

当然。我清楚地记得,当时我没有表现出任何痛苦或困惑。养父母解释后,他们问我是否还好,我下意识地说“好”,然后陷入了自我封闭。从那时起,我戴上了我的第一个面具。后来,我的人生座右铭之一变成了“永不解释,永不抱怨”。回想起来,我认为这种家庭上的打击对我来说非常重要,它导致我发展出一个夸张的性格,以至于没有人能察觉到我内心的状态。


你能告诉我们为什么你的养父母会选择领养你吗?

我的养母无法生育。她有很多兄弟姐妹,想建立一个家庭。他们领养了我,圆了她的梦想,我对此心怀感激。家里总是有很多孩子,因为我的父母会对社区里的孩子们敞开大门,家中常常充满欢声笑语。我有很多朋友。我的父母也成为了寄养家庭,他们接纳了一位年轻女孩,她至今仍是我们家庭的一员。


能分享一下你的童年记忆,描述一下当时的氛围吗?

如果要用几个词来概括我的童年,那就是:爱、阳光、友谊、平和、欢乐和简单。

我的童年是在罗马、格勒诺布尔和法维尼亚纳之间度过的。父母在法维尼亚纳有一座小海边别墅,我们每年夏天都在那里度过。在罗马,家族拥有一整栋楼。底层是洗衣房,上层是我的姑姑、奶奶和我们一家住的地方。我很幸运有这么多成年人围绕着我。我有一个美好的童年,有人甚至会说我是被宠坏的孩子。同时,我的思维总是被不断地激发,我很快就发展出了快速的思维能力。


你如何评价你的家庭社会阶层?

我会说我的家庭属于中产阶级,拥有罗马的一栋楼、一座法维尼亚纳的度假别墅,甚至还有一艘小船。我记得那是一艘“诺斯特罗莫号”,我父亲将它命名为“彼得”。在我们买下它的那场船展上,我晕船了。我父亲以为我是在装病,责备了我。但病情持续到晚上,他才意识到我是真的不舒服。医生来了,诊断我患了脑膜炎。我得到了妥善的治疗,没有留下后遗症。也许是出于道歉,或者是为了纪念我的康复——我不确定——我父亲为船命名为“彼得”。你可以想象,这对我来说是一个极其自豪的时刻。


你提到在法维尼亚度过假期。那时岛上的生活是怎样的?

法维尼亚的生活很简单。这个岛只有17公里长。生活的全部就是骑自行车、在市场上买鱼、晒太阳和在海滩上玩耍。我记得我对捕捉章鱼情有独钟——真是一个奇特的爱好!我们还喜欢做冰淇淋、摘无花果和收集其他水果。那真是人间的小天堂。作为一个小岛,对于我这个年幼的孩子来说,这里简直是梦幻般的地方。但到了青春期,情况变得复杂,因为对我来说这里安静得太过分了。

我父亲非常热爱这个地方,以至于他梦想着全年居住在那里。他花了好几年才做出这个决定,但通过出售家族企业的股份并明智地投资这些资金,他最终得以退休,并将家庭迁到法维尼亚。那时,我已经是青少年了。我发现自己处于一个非常乡村的地方,而在罗马,我过着丰富多彩且愉快的生活。你必须明白,岛上的人说着地方方言,他们称我们为“法国人”。对西西里人来说,我们是外来者!法维尼亚刚开始变成“意大利的圣特罗佩”。


关于意大利有许多陈词滥调,其中之一是宗教的重要性。你是在天主教信仰中成长的吗?

我的大家庭是福音派信徒,非常虔诚。他们每个星期天都会参加礼拜。至于我的直系家庭,虽然他们也是信徒,但灵活得多。只有我的母亲更加虔诚。我是在广泛的宗教自由中成长的,这让我心怀感激。如今,考虑到我所经历的一切,我不再相信。我尝试通过探索佛教、道教和其他宗教与哲学来理解,但我的结论总是相同的:所有宗教都是人类创造的,因此从一开始就存在偏见。


你的学业如何?

在我17岁之前,我在罗马上学。我就读的公立中学是布鲁诺·布奥齐学校。为了上高中,我们正式搬到了法维尼亚,我在巴勒莫的私立林克校园高中继续学习。我在那里待了两年。

说实话,我从未真正适应过。在这段时间,我经历了我的初恋。我立刻接受了自己性别流动的一面。无论是男人还是女人,对我来说并不重要,只要这个人很美。尽管巴勒莫是个大城市,但我发现这里的心态非常封闭,每个社区都有独特且强烈的特征。我尽我所能地想要离开。

然而,这段时间也有一些积极的方面。我记得在那两年里,我和一群朋友追随一个乐队——一个由五个年轻人组成的音乐组合,演奏民谣和嘻哈的混合曲风,名为Tintura。我们尽可能多地去看他们的表演,多亏了他们,我几乎游遍了整个西西里,包括阿格里真托、锡拉库萨等地。


你小时候的梦想职业是什么?

我曾设想自己从事刑法工作,但我缺乏综合能力。我的思维非常快速;我天生喜欢行动。周围的人常常认为我很困惑,但其实不是,我只是思考得很快,能够预见三四步。很快我意识到,花费数小时在图书馆撰写法律文件、修改并重写直到完美并不适合我。我需要快节奏、刺激、迅速和生动的事物。最终,律师的生活对我来说感觉过于狭窄;我需要空间,即使这常常意味着跳入未知之中。

于是,我选择了休学一年。我试图建立一个网络,以进入电影行业,认为我的外向个性能够吸引人。我寻求担任临时演员的工作,这也是我返回罗马的原因。我试图参加罗马的VIP派对,但事情并不顺利,因此我继续前往威尼斯,在那里呆了三个月。这个城市很美,但对我来说太安静了,于是我逃到了米兰,这个经济中心,我在那里住了一年。

我记得有一天,我正在为一档电视节目进行试镜,同时在米兰寻找住所。等待试镜时,我结识了一位年轻女士,她介绍我认识了她的母亲,正是当时最顶尖的模特之一巴巴拉·马鲁戈。我们立刻合得来,巴巴拉热情地邀请我暂时住在她家。从那时起,我们成了朋友。尽管得到这样的宝贵帮助,我意识到米兰并不适合我。

18岁时,我回到了罗马,继承了我亲生母亲的遗产——这一遗产直到我18岁生日才被解锁。与此同时,我得知我的养母得了癌症,病情非常严重。

当时我正在戏剧艺术学院就读,但我缺席并且表现不佳,因为我所有的注意力都集中在我的母亲身上。

在她治疗期间,我搬到了巴黎。我认为巴黎会是我的逃避之地。简单来说,我完全迷失了方向。

六个月后,我的养母因癌症去世。

在她的葬礼上,我正在为我的母亲悲伤时,听到她在教堂里说道:“微笑面对生活,生活也会回馈你微笑。”这句话听起来可能很令人惊讶,但听到这样美丽而智慧的建议让我感动不已。我带着微笑和对生活的渴望走出教堂。我把这句话当作我的第二个座右铭。但它对我来说也成为了第二种面具:在面对逆境时总是积极的公众形象,而在私下却保持现实。这种矛盾有时是无法调和的。

我记得不久后领养了我的狗Zampa,一只在收容所找到的边境牧羊犬。我犹豫着要不要说,但它非常聪明、善良,我常常感到我的母亲的部分在它身上。它太可爱了,一只神奇的狗,非常保护我。


看起来你曾是一个有些迷失的年轻人,在你母亲去世后,你的处境一定变得更加严峻?

我离开了罗马,去了卢森堡以清理我的思绪,在那里我遇到了一位名叫巴斯蒂安的男子,他支持了我。他同样迷失;事实上,起初我们互相支持。

巴斯蒂安带我去了龙维,那里我们的生活相当愉快。我在一家多品牌商店工作,迅速成为卢森堡的最佳销售员。至于巴斯蒂安,他在Kinepolis工作。他梦想着旅行和过奢华的生活,而我则更渴望宁静和简单,寻找自我。回想起来,我觉得巴斯蒂安从我的生活中获益更多,而我对他却没有太多利用。我们在意大利和其他地方旅行了很多,费用始终由我承担,而我没有意识到巴斯蒂安是在依赖我。几年之内,我的遗产就像阳光下的雪一样消融殆尽。

我们在一起大约六年,但矛盾重重。我最终决定在龙维租一个小公寓。我只有一个行李箱和我的狗。我感到自由,但我低估了巴斯蒂安的恶意。他想为我与他疏远而复仇。他尽一切可能让我失去工作,并通过谣言和诽谤成功了。我再也无法支付租金,只好离开我的公寓。我告诉自己必须彻底改变生活,重新掌控自己的生活。我必须离开,逃离那个有毒的环境。我的决定已经做出——我必须去巴黎。

我身无分文,敢于上路,只能选择搭便车。

我记得一个小插曲。我在梅斯转机,在一个高速公路休息区,正在公共洗手间清洗。那里宽敞明亮,我在水池旁摆放好我的小奢华美容套件,舒适地待着。正好遇见了一位优雅的女士。她对我微笑,十分迷人,我们开始聊起了各种话题。我们谈得很投机,并朝着建筑物的主大厅走去。我看到外面停着一辆美丽的绿色捷豹,意识到那是我新认识的人的车。她解释说她要去斯特拉斯堡,问我是否想和她一起去。我犹豫了一下,但我的潜意识替我发言,我拒绝了。她坚持邀请,但我确认不行,我必须去巴黎;我的生活在那儿等着我。我常常想起她——为什么这位美丽优雅的女性会主动与我交谈?她是在调情吗?她看到了我的困扰吗?她只是想要一个朋友吗?我不知道。如果我接受了她的斯特拉斯堡邀请,我的生活会怎样?我会幸福吗?我认为这个看似微不足道的事件对我产生了深刻的影响,因为这是我第一次没有跟随他人或听从建议,而是有意识地做出了自己的决定,意识到去巴黎是我的选择,并且这将改变我的生活。


你抵达巴黎的经历如何?

那是2008年,我对巴黎的记忆仅限于年轻时的几次旅行,但我对这座城市怀有深厚的感情。然而,我没有地方可以睡觉,没有联系人,也没有钱。唯一与我有些交情的人是蒂埃里,他是阿门西亚咖啡馆老板托尼·戈麦斯的情人,阿门西亚咖啡馆位于玛黑区,后来又开了Féria咖啡馆。我去找蒂埃里,想请他给我找份工作。这并不容易,我感到相当孤立,尽管我没有表现出来。很少有人知道,在那段时间,我睡在塞纳河岸上,正对着银塔,在一张石凳上。这很危险,我必须小心不要被抢或纠缠。我像个无家可归者一样睡了几个星期。最终,我设法见到了蒂埃里,凭借我的口才,我在Féria咖啡馆找到了一个服务员的工作,虽然只做了一周,因为我的表现非常糟糕。老实说,由于我有阅读障碍,思维又快,加上我天生的笨拙,我当了一个糟糕的服务员。但我非常友好,顾客们都喜欢我。

就是在那时,我遇见了热罗姆和他的兄弟。我清楚地记得他们点了一个汉堡和薯条,我不小心把托盘洒在了他身上,同时满不在乎地说:“呼,我没弄脏自己!”(对我来说,这一点很重要,因为我无力去洗衣店)。当然,我的评论与现实完全脱节,因为被食物弄脏的是顾客热罗姆。热罗姆没有生气,反而笑了我的大胆,我们开始聊天。在结账后,蒂埃里向他解释了我的情况。出于同情,热罗姆主动给我提供了一个住处。我当然答应了,因为在巴黎睡在星空下实在太冷了。我没意识到他们住在库隆米耶。因此,我发现自己和两个陌生人一起踏上了一段未知的旅程,前往一个我一无所知的小镇。房子很大。我住在后面的房间里,连睡了72个小时,实在是太疲惫了。热罗姆担心我生病了,因为睡这么久实在是非同寻常。但他不敢叫醒我,因为我们几乎不认识。后来,我解释了我的情况,这也有助于澄清我极度疲惫的原因。在聊天时,他表达了想离开库隆米耶、去巴黎生活的愿望。他在一家女装店工作,虽然生意冷清但却没有激情。我建议道:“我们为什么不试着一起做点什么?征服巴黎!”但目前我必须每天去巴黎在Féria工作。我没有预料到每天乘火车或公共汽车的通勤是多么的疲惫和困难。

蒂埃里很正确地认为我不能继续做服务员,给我提供了餐厅促销员的工作。凭借我的魅力,我吸引了顾客——包括同性恋者、女同性恋者和其他人。随着我对玛黑区的了解加深,我与Raidd酒吧的老板成为了朋友,这是一家在玛黑区新开的时尚酒吧,以其夜间的歌舞表演而闻名。我在凌晨2点结束工作,然后乘公共汽车返回库隆米耶。这非常累人。

因此,热罗姆和我决定在圣路易岛租一间公寓。讽刺的是,这间公寓距离我曾在塞纳河岸上睡觉的地方仅20米。

公寓位于圣路易岛75号,位于一楼,面积50平方米。多亏了我在夜生活圈的关系,我们设法以远低于市场价的租金租下了这个地方。我继续担任促销员,而热罗姆在白天找到了一个销售员的工作,晚上则在L’Auberge des Deux Ponts做服务员。

在玛黑区,我被称为“彼得疯子”。我与各种伴侣建立了关系——男人、女人和变性人——我在无论是女同性恋、男同性恋还是变性人俱乐部都受到欢迎。

在Raidd酒吧,我被称为“来自好家庭的年轻人”,在那里我遇到了埃利奥斯,他让我认识了圣日耳曼德佩,特别是由科斯特家族经营的圣日耳曼酒吧,由克里斯托夫负责。在那里,我遇见了一位名叫安迪的女性,她是一名模特和前美后,住在圣佩尔街54号,与凯特·摩斯、让·保罗·戈尔蒂耶和约翰·加利亚诺是亲密朋友。她有一套200平方米的公寓,常常感到孤独,于是我们会一起狂欢到黎明。就这样,我结识了《一个先知》中的演员阿贝尔,戈尔蒂耶,蓝字公司(Les Mots Bleus)的克里斯托夫,以及菲利普·斯塔克。我们常常光顾蒙特娜酒吧,尤其是雅各布梯田(L’Échelle Jacob),位于雅各布街12号。


你能描述一下你对加利亚诺的印象吗?

当我遇见加利亚诺时,他刚刚失去了他的狗,并且保持着清醒。他最近从佩德罗那里购买了一幅画。他很善良,古怪,稍显张扬。在他的职业生涯中,他是狂野的,但我遇见的这个人与2011年丑闻中的他完全不同。在我看来,是LVMH将他推向了边缘,导致了他的崩溃。加利亚诺突然崩溃——这并不明智。这显然是愚蠢的,但他是否意识到发生了什么?他是否被LVMH操控了?我不知道。但这个故事模糊不清,可能永远不会明了。


你能告诉我们你发现圣日耳曼区的经历吗?

在圣日耳曼咖啡馆,我们饮酒过度。每个人都在吸毒,我们总是制造喧闹的场面。楼上,我们会打台球。那是一种狂野而颓废的氛围,非常 reminiscent于世纪之交的气息。


“彼得消失后,我们无法完成采访。”

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